Les civils dans la grande guerre
Voici le dernier volet du très riche #généathème de novembre, consacré à la première guerre mondiale. J’ai quitté cette fois les lignes de front pour tenter d’imaginer comment les habitants de Borso avaient vécu les combats tout proches.
En 1915 mon grand-père a 24 ans. Lorsque l’Italie entre en guerre aux côtés de la Triple-Entente, le 23 mai 1915, il n’est l’époux de ma grand-mère que depuis 23 jours. Il aurait sans doute été réquisitionné s’il n’avait été réformé à cause d’un handicap à une jambe. Son frère Ferruccio, plus jeune de deux ans, a émigré au Texas depuis 1908. Il a été enregistré lors du premier recensement des hommes vivant sur le sol des États-Unis et susceptibles d’être réquisitionnés. Je ne crois pourtant pas qu’il ait été envoyé en Europe. Il travaillait dans une mine, et réduire la production de charbon pour envoyer les mineurs au front outre-atlantique n’était sans doute pas une priorité.
Et lorsque cette éventualité est devenue une réalité, le son des combats a dû rouler jusqu’au bas de la montagne. J’imagine les craintes des habitants de Borso, se demandant si les troupes italiennes allaient tenir ou si les Autrichiens allaient déferler dans la plaine. Ils avaient certainement entendu parler de la destruction d’Asiago ou de Gallio, villes de l’altipiano distantes d’une vingtaine de kilomètres, par les réfugiés qui avaient réussi à s’enfuir, et ils devaient vivre avec la peur d’avoir à fuir à leur tour et de tout perdre, y compris la vie.
La vie quotidienne elle-même était bouleversée par la guerre. Des divisions étaient basées à Borso, se préparant à monter au front. Les terrains agricoles avaient été réquisitionnés pour les exercices militaires et le stockage du matériel. Certains habitants visitaient les hôpitaux de campagne et y voyaient les horreurs de la guerre. Les cimetières militaires provisoires aménagés dans les villages se peuplaient inexorablement…
Contrairement à Romano d’Ezzelino, le village voisin, qui se trouvait sous les feux de l’artillerie autrichienne, Borso en était protégé par la configuration du relief. Mais des bombardements aériens frappaient les villes de la région comme Padoue, Castelfranco, Bassano, Venise… Des avions abattus s’écrasaient dans les villages. L’un d’eux est tombé sur Borso, comme le relate La Stampa, en date du 26 février 1918.
2 commentaires
Cedeca Desbranches
Intéressant de voir de ce côté là aussi
venarbol
En France, fort logiquement, nous apprenons et commémorons la grande guerre sur le front français. Mais en Italie, en Grèce … militaires et civils ont vécu des événements dramatiques assez similaires. Et malgré tout, là bas non plus celle qui devait être la “der des der” ne l’a malheureusement pas été.