Q comme Queensland
J’ai longtemps pensé que je devrais m’avouer vainQ(e) mais finalement le salut pour le sujet de ce jour m’est venu des antipodes.
Si les Italiens commencent à émigrer en Australie à la fin du XIXe siècle, le phénomène est alors très limité. La vague d’immigration italienne démarre essentiellement après la seconde guerre mondiale, car l’Australie manque alors dramatiquement de bras et fait appel à une main-d’œuvre venue de l’étranger. En outre, les quotas imposés aux ressortissants venus d’Europe du sud pour l’entrée sur le territoire américain dès les années 1920 contraignent les candidats italiens à l’expatriation à se tourner vers d’autres horizons que ceux choisis par leurs ainés. Jusqu’au début des années 1970, les immigrés Italiens étaient encouragés à renoncer à leur nationalité pour devenir des “new Australians”, ce qui pouvait décourager certains. Mais la mise en place en Australie d’une politique multiculturelle a par la suite amplifié encore le phénomène.
C’est ainsi que si dans les années 1870 seuls 150 Italiens s’installent chaque année en Australie, ils sont 6000 à 7000 par an à entreprendre ce voyage cent ans plus tard. Entre 1948 et 1969, plus de 347.000 d’entre-eux s’installent en Australie et dès 1959 leur population dépasse 200.000, ce qui en fait le plus important groupe d’immigrés non anglophones du pays.* Avant l’essor de l’aviation commerciale, le voyage se faisait à bord de bateaux partis de Gênes ou de Messine et qui mettaient six à huit semaines pour gagner Perth, Melbourne et Sydney, via le canal de Suez. Il n’était pas rare que le père de famille vienne d’abord seul, n’étant rejoint par sa femme et ses enfants que lorsqu’il avait gagné suffisamment d’argent pour financer leur traversée, ce qui pouvait parfois prendre plusieurs années.
Le Queensland, état du nord-est de l’Australie, a connu une forte immigration italienne au XXe siècle. La ville d’Ingham est emblématique de ce phénomène.
Ingham est situé à environ 1500 kilomètres au nord de Brisbane, la capitale du Queensland. Son histoire est intimement liée à celle de la canne à sucre ; à proximité se trouve la plus grande usine de sucre de canne de l’Australie. Cette activité fortement demandeuse de main-d’œuvre a tout naturellement généré une importante immigration italienne, qui a valu à Ingham le surnom de “little Italy”. Comme ailleurs, cette arrivée massive d’Italiens n’a pas toujours suscité que de la sympathie chez les “white Australians”, dont certains allaient jusqu’à qualifier les Italiens de “blacks” car la taille de la canne à sucre n’était à leurs yeux pas un “travail de blanc”. Leur intégration s’améliorant au fils des années, les Italiens acquirent le statut de “white aliens”, avant de devenir des Australiens à part entière.
Aujourd’hui encore, plus de la moitié de la population d’Ingham possède des ascendances italiennes. Chaque année l’Australian Italian festival voit la ville d’Ingham célébrer cet héritage.
La carte ci-dessus montre qu’en 2011 le nord de l’état du Queensland comportait encore un très fort pourcentage d’habitants d’origine italienne.
Lino Andreatta, un cousin issu-de-germain de mon père du côté de sa grand-mère maternelle, est l’un de ces Italiens qui ont tenté leur chance au “pays d’Oz”. Pourtant à l’origine son objectif était de quitter Fietta pour rejoindre ses quatre frères et sœurs installés en Californie.
Mais depuis 1924 les Etats-Unis avaient établi des quotas d’immigration qui limitaient l’entrée des Italiens sur leur sol. Sachant qu’il était plus facile d’y entrer en venant d’Australie, Lino décide de prendre cette voie de traverse et débarque le 3 février 1926 à Melbourne, en provenance de Gênes. Mais la possession d’un passeport australien lui est nécessaire pour émigrer aux USA. Lino fait donc les démarches nécessaires et acquiert la nationalité australienne le 26 mars 1931.
Il se marie en 1933 à Sydney avec Elizabeth, une jeune femme d’origine anglaise, et décide finalement de rester en Australie où il est désormais bien établi. Du fait de sa naturalisation intervenue avant la seconde guerre mondiale, il a sans doute pu échapper aux camps d’internement imposés par l’Australie aux Italiens à compter de l’entrée en guerre de l’Italie contre l’Angleterre.
Selon les informations enregistrées dans les listes électorales, le couple a d’abord vécu dans le Queensland à Ingham, où Lino travaillait comme cane cutter (coupeur de canne à sucre).
Elizabeth et Lino se sont par la suite installés dans l’état de Victoria, entre 1937 et 1943. Il en sera question dans un prochain article…
En savoir plus :
– *Australian post-war immigration issues according to Italian-language newspaper Il Globo, 1959 – 1969, Edwards, Brent R. T, Thesis
– Italians in north-Queensland
– Ingham – Queensland
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Légende des pictogrammes utilisés dans les cartes :
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Un commentaire
Monique F.
Les racines des arbres généalogiques s’étendent bien loin…